Conseil Municipal du 22 novembre 2012 Débat d’orientations budgétaires Intervention de Dominique ATTIA

Publié le par Dominique Attia, Stephan Beltran, Murielle Bensaï

Moment récurrent et important de la vie politique locale, le débat d’orientation budgétaire est  placé ce soir sous un éclairage nouveau, parce qu’entre temps une nouvelle majorité a été élue à la tête de notre pays.

Nous nous sommes tous réjouis et particulièrement à Montreuil où la gauche toutes tendances confondues a obtenu près de 75 %  des voix; Et un score non négligeable du Front de gauche, l’un des meilleurs en Ile-de-France.


Nous sommes en effet bien obligés, au bout de 6 mois de gouvernement PS, auquel Europe Ecologie Les Verts, participe.


On aurait pu espérer avec cette élection, une bouffée d’air, moins vicié, moins pollué par l’austérité, la rigueur et autres discours sur fond de crise où l’inaction gouvernementale se rajoute à la gueule de bois des lendemains qui déchantent.


Mais quelles sont les raisons qui empêchent ce gouvernement de proposer des mesures alternatives et audacieuses, plutôt que de nous plonger encore davantage dans le serrage de ceinture et nous engluer dans la logique mortifère du capitalisme financier?

Ce gouvernement qui se réclame pourtant de la gauche est celui du renoncement, de la capitulation devant les financiers et les grands actionnaires.

Où sont les actes s’agissant de cette promesse électorale d’interdire les licenciements boursiers, pour exemple, SANOFI entreprise qui a réalisé 8,8 milliards de bénéfices nets en 2011 et annonce dans le même temps une charrette de plans sociaux.

Sans parler du renoncement à renégocier le pacte budgétaire, concocté par Merkel et Sarkozy et finalement signé.

Ou encore du maintien par le Gouvernement de la Révision Générale des Politiques Publiques, dont le seul objectif est de réduire partout le nombre de fonctionnaires, donc l’action du service public. Les Grecs, les Portugais, les Espagnols subissent de plein fouet ces politiques …

La France n’est pas non plus épargnée puisque la pauvreté est grandissante en particulier dans notre département comme l’ont souligné ces derniers jours le Secours catholique d’une part, l’Observatoire des Zones Urbaines Sensibles d’autre part.

C’est donc là le nouveau contexte dans lequel se situe ce débat budgétaire, ce que vous appelez pudiquement en première page « contexte délicat » …


Vous ne vous y êtes pas trompée non plus, vous qui nous soumettez aujourd’hui ce document. Mais une fois de plus, vous gérez sans audace.


Et ici est notre profond désaccord, Madame la Maire.

A rebours de vos camarades d’Europe Ecologie-Les Verts, avez affirmé votre franc soutien à la ratification du traité budgétaire d’une façon très tranchée, je cite "on n'est pas en train de se doter de carcans supplémentaires qui nous empêcheraient de mener nos propres politiques". Et bien, si !

Et en vérité, vous utilisez tous les artifices pour ne pas faire crouler votre gouvernement sous le poids de sa propre responsabilité.

En particulier, vous développez tout un argumentaire qui vise à faire passer toutes les difficultés financières des collectivités pour un problème de déficit de l’Etat et seulement de l’Etat.


La réalité c’est que l’impact et les conséquences des décisions budgétaires de ce gouvernement,  sur les budgets des collectivités seront bel et bien visibles dès 2013 : 750 millions d'euros par an jusqu'en 2015 auxquels il faut ajouter les 10 milliards supplémentaires d'économies que le Gouvernement vient d’annoncer.


Dans ce contexte, vous nous présentez des Orientations Budgétaires que l'on pourrait résumer à vrai dire très simplement : c’est la crise, c’est la rigueur, mais nous avons été les meilleurs gestionnaires du monde depuis 2008 et donc cette année encore, nous pouvons vous présenter un budget offensif, avec la solidarité et l’amour de notre prochain au cœur !

Une lecture attentive montre toutefois que votre herbe n’est pas si verte.


Sur le fond, malgré tous vos artifices, vous êtes en cohérence totale avec la politique austéritaire du gouvernement, je vous cite : « dans un contexte national et européen de rigueur budgétaire (Non Madame Voynet, il s’agit de politiques choisies, délibérées d’austérité, décidées par Berlin et Paris avant l’élection de François Hollande mais acceptées et mises en œuvre par lui), qui risque (ce verbe doit hérisser le poil de toutes celles et ceux qui sont touchés de plein fouet par la crise) d’aggraver la précarité et de fragiliser les services publics nationaux et communaux, notre devoir, en tant que municipalité de gauche, est de veiller à une redistribution équitable d’une ressource qui se raréfie ».

En résumé, nous partagerons équitablement les quelques miettes qui seront disponibles, ce qui n'est rien d'autre que le discours rôdé des libéraux !


Une fois cette orientation posée, vous nous faites un grand tour de passe-passe.

Plus c’est gros et plus cela a de chance de passer, vous dites vous, sans doute, et vous voilà donc à mettre en avant ce que vous allez financer et à passer sous silence ce que vous allez couper !

Première question donc, quels seront les secteurs de l’action municipale qui seront soumis à des coupes budgétaires pour 2013 ?

Nous avons du mal à imaginer que, dans un tel contexte financier, vous n'ayez envisagé aucune coupe afin de répondre aux injonctions d'économies du Gouvernement, injonctions que vous avez défendues.


Venons-en à vos principales orientations.

Il y a aurait de quoi faire un catalogue à la Prévert de questions, tant certaines informations et affirmations laissent dubitatif …


Par exemple : En matière de dépenses de fonctionnement, vous annoncez la création de postes dans les domaines prioritaires. Très bien.

Pouvez-vous cependant nous préciser s’il s’agit de réelles créations de postes ou s’agit-il d'honorer votre engagement à recruter des contrats d’avenir, mesure phare du Gouvernement au sujet de laquelle étrangement vous ne dites pas un mot ?


Dans les grandes lignes de vos actions, je voudrais relever quelques inexactitudes, qui vous servent bien dans votre communication, mais qui ne trompent personne …


Ainsi en est-il, en période de crise qui se généralise, c’est habile, des consultations pour les personnes précaires dans les CMS.

Il faudrait rappeler qu’en fait ces consultations existaient depuis de nombreuses années jusqu’à ce que, récemment, un médecin, en désaccord avec vos décisions de supprimer des activités pourtant qui fonctionnaient, et votre façon de mener le dialogue social avec les CMS, ait choisi de démissionner. Que vous les remettiez enfin en service est une bonne nouvelle, mais c’est loin d’être innovation. La question serait plutôt de savoir pourquoi vous avez attendu deux années pour remettre en route cette prestation.


Un peu plus loin, vous nous présentez un très séduisant paragraphe sur les économies d’énergie.

C’est une nécessité et les résultats avancés sont encourageants.

Encore faut-il préciser que, là aussi, plusieurs des mesures que vous présentez pour votre propre compte ont été initiées par la précédente municipalité.

Souligner aussi que vos réorganisations, vos suspicions systématiques ont amené à un arrêt de plusieurs démarches de fond et au départ d’un technicien qui chapeautait ce dispositif …  

Nous sommes heureux d’apprendre qu’enfin, le « travail structurel » pour reprendre vos termes, sur l’énergie a repris.


Nous notons vos efforts financiers sur les crèches, mais aussi une demi page sur l'éducation qui ne nous dit rien de plus que ce qui se fait déjà, sans aucune donnée budgétaire !


Vous annoncez la poursuite du PRUS La Noue et le lancement de travaux dans les espaces publics.

Vous avez pourtant annoncé, Madame la Maire, lors d’une récente réunion publique, que ces travaux ne débuteraient pas avant 2014.

Qui croire ? Madame la Maire en réunion publique ou Madame la Maire présentant son budget ?

Concernant vos dépenses d’investissement, force est de constater que vous prenez tellement de précautions, qui cachent tellement d’incertitudes (notamment quant aux débats sur les compétences des collectivités ou la péréquation financière) qu’on en viendrait presque à se demander si c’est bien le moment de débattre de ce document d’orientation budgétaire …


Votre argumentaire sur la dette, prête lui aussi à réflexion.

En effet, notre Collègue Gaylord Le Chéquer avait souligné, lors du précédent conseil, que le niveau de l’emprunt contracté par la collectivité était passé de 6,5 millions d’euros à plus de 33 millions d’euros en moins de 4 années (de 2009 à 2012).


Encore faut-il noter que les projets phares de la municipalité sont à peine lancés puisque plusieurs d’entre eux servent à illustrer ce que vous allez faire en 2013.

Nous ne considérons pas, cependant, que le recours à l’emprunt, que l’endettement soit par nature mauvais, contrairement à un discours qui est largement répandu, et qui sert bien les politiques d’austérité que les milieux financiers, relayés par les néo-libéraux, appellent de leurs vœux sur l’ensemble du continent européen.


Non, au contraire, nous pensons nécessaire et légitime l’emprunt, l’endettement dès lors qu’il a vocation à financer des projets d’utilité sociale, d’intérêt général.


Mais sur ce point, là encore, nous en revenons à la première question posée : puisque vous allez nous dire que la ville ne s'endette pas puisqu'elle rembourse plus qu'elle n'emprunte, sur quelles politiques, sur quels secteurs municipaux faites vous des coupes budgétaires, quelles réductions de service public ne nous sont pas présentées ce soir?


Au final, nous retenons deux éléments de ces orientations :


- le premier est que si vous parvenez à poursuivre l'avancement de vos promesses, fussent-elles contestées ici ou dans la population, vous avez définitivement fait vôtre, l’orientation libérale européenne de réduction du champ d'intervention des services publics et de leur cantonnement dans la gestion de la pénurie et des plus défavorisés.

- le second, est que le débat est quelque peu biaisé, puisque vous ne présentez qu'une partie de vos orientations budgétaires et passez sous silence vos mesures d'économies.

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